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Cette lecture se révélait quelque peu
éprouvante pour moi. J'avais l'impression de violer l'intimité de
Till. J'étais surpris par le lucidité avec laquelle il analysait
son comportement. Je me remémorais moi aussi ces instants. S'il
avait été attiré par Lou, elle aussi, dès le début avait
ressentit des choses pour lui. Je me souviens des regards qu'elle lui
lançait, et ses efforts pour faire comme s'il ne se passait rien en
elle.
Depuis notre rencontre, dès les premiers instants, j'avais pu
lire en elle comme dans un livre ouvert. Enfin, la vérité c'est que
j'avais eu d'abord envie de la séduire.
En visite à Paris, Arnaud m'avait
trainé au vernissage d'une exposition de photographies dans une
galerie d'art en vogue à l'époque. J'étais dans l'état d'esprit
du chasseur qui ne compte pas rentrer à l'hôtel seul. Je m'en
foutais pas mal des œuvres. Puis en arrivant, j'avais été frappé
par ces clichés plein d'une sorte de violence sourde. Autour de
moi, beaucoup de jeunes femmes, plus belles les unes que les autres.
Mais c'est sur Lou que mes yeux se posèrent véritablement. Lou
avait toujours eu une beauté particulière. Pas ce genre de beauté
qui vous saute aux yeux, mais un charme discret dans son visage, une
sensualité dans ses gestes et sa manière d'être, une part de
mystère aussi. Alors non, ce n'était pas plus belle de la soirée.
Mais c'est elle que j'abordai.
- Ces photos doivent sans doute être
l'oeuvre d'une grosse brute.
Elle explosa de rire. Parce que bien
évidement, je ne savais pas que c'était elle l'artiste et il avant
fallut que je l'aborde avec cette accroche. Elle ne le prit pas mal,
et la glace était rompue.
Quelques heures plus tard, dans ma
chambre d'hôtel, les choses ne se passèrent pas comme je l'avais
prévu. Nos gestes étaient si maladroits ! Griffures et
morsures involontaires, et j'en passe... Sans doute la pire relation
que je pouvais imaginer. Mais ce que nous avons rit. Aux éclats.
Passant le reste de la nuit à discuter comme de vieux amis qui ne s'étaient pas vu depuis des années.
Depuis ce soir là nous nous
téléphonions souvent, tous les jours presque. J'allais souvent à
Paris pour la voir aussi.
Adam dormais à points fermés. Je le
regardais en pensant à sa mère. Lou n'avait vraiment pas eu une
existence simple. Je me souvins d'un soir où nous nous étions
racontés notre enfance, la vie difficile en Allemagne de l'Est pour
moi, les difficultés avec ma famille... Puis à son tour elle avait
révélé ses blessures.
- Ce que je t'ai raconté, je ne l'ai
jamais dit à personne.
Lorsqu'elle avait dix ans, elle a eu
un accident de voiture avec ses parents et son frère alors qu'ils
revenaient de vacances. Elle avait été la seule à survivre au
choc. Je n'osais même pas imaginer ce qu'une telle épreuve pouvait
représenter pour une enfant. Mais alors que je croyais qu'elle
venait de me révéler sa véritable blessure, elle me révéler la
véritable raison de cet air mélancolique toujours présent dans
son regard. Elle décrit tout dans les détails, me donnant presque à
voir ce qu'elle avait vécu.
Lou était heureuse que le cours de
mathématiques ait été annulé au dernier moment, lui laissant une
après-midi libre pour se retrouver seule comme elle aimait souvent
le faire. Elle était aussi ravie d'échapper aux chiffres et autres
figures géométriques, qu'elle trouvait trop froides et qu'elle
était incapable de maîtriser.
- Vous êtes un cas désespéré,
avait dit un jour son professeur en constatant son incapacité à
comprendre le fonctionnement et l'utilité d'une équation.
Lou vivait chez son oncle et sa tante
depuis le décès de sa famille. La sœur de son père l'avait
accueilli dans sa famille.
- J'étais une adolescente
introvertie, un peu mélancolique.
Lou rentrait donc à la maison, ravie
de se trouver seule quelques heures. Elle avait besoin de mettre un
peu d'ordre dans sa tête. Depuis quelques semaines elle fréquentait
un garçon, Thomas. Il avait deux ans de plus qu'elle. Elle avait de
l'affection pour lui et une véritable attirance, mais elle n'était
pas amoureuse.
- Enfin, c'est ce sue je me disais. Ce
que je ressentais pour Thomas n'avait pas d'écho dans toute la
littérature que je consommais de manière boulimique.
Elle avait sourit en se faisant cette
réflexion, se moquant d'elle-même : « je suis la
nouvelle Emma Bovary... ». Elle s'était trouvée tellement
ridicule qu'elle avait ri ouvertement. Cela lui avait valu une heure
de colle, parce qu'évidement elle avait eu cette pensée pendant un
cours de maths...
Ce qu'elle aimait avec Thomas c'était
le sexe. Pas le sexe pour lui même, non, elle n'avait pas encore
connu l'orgasme. Elle découvrait son corps, celui de l'autre aussi,
et ressentait en elle ce bouillonnement qui s'empare des nos veines.
Elle était une exploratrice des sensations et commençait à
comprendre que l'on pouvait s'abandonner complètement. Dans sa
relation avec Thomas elle appréciait n'avoir aucune sensation de
manque : elle pouvait passer des jours sans le voir sans que
cela lui fasse mal. Son amie Dorine ne la comprenait pas. Cette
dernière ne pouvait passer plus d'une demi-journée sans voir son
petit ami, et se précipitait dans ses bras à chaque moment de pose
entre deux cours. Dorine avait conclu que Lou était une sorte
d'extra-terrestre.
Arrivée chez elle, Lou se précipita
vers la cheminée : l'hiver était glacial. Elle resta devant
l'âtre quelques minutes puis monta dans sa chambre. En entrant elle
poussa un cri, effrayée. Son oncle était assis à son bureau,
tournant le dos à la porte.
- Bon Dieu ce que tu m'as fait peur !
S'exclama Lou, le souffle court.
- Désolé, répondit-il sans se
retourner.
- Que fais-tu ici ?
Demanda-t-elle, fâchée qu'il se permette d'entre ainsi dans sa
chambre.
- J'ai trouvé ceci dans tes
affaires...
Elle se déplaça pour voir l'objet en
question, posé sur le bureau. C'était une boite de préservatifs.
Elle sentit le rouge lui monter aux joues, puis se reprit. Son oncle
ne la regardait toujours pas, fixant la boite posé sur le bureau.
- Et alors ? Demanda-t-elle,
insolente.
- Tu n'est plus vierge ?
- Qu'est-ce que cela peut bien te
foutre ? Cela ne te regarde vraiment pas.
Son oncle la regarda enfin, avec une
expression bizarre. Il se leva et lui fit face. Il s'était
positionné très proche d'elle, trop proche. Il la regarda de la
tête aux pieds. Elle se sentit mal à l'aise. Il la prit dans ses
bras. Elle se dégagea de son étreinte, il n'insista pas.
- Tu es entrain de devenir une très
belle femme, dit-il.
- Non mais qu'est-ce qu'il te prend !
Lou était dos au mur et sentait que
la situation était anormale. Mais elle n'était pas effrayée, pas
encore. Il s'approcha d'elle et plaqua son corps massif contre celui
de Lou. Elle ne pouvait plus bouger. Elle dit :
- Arrête, s'il te plait. Je ne trouve
pas ça drôle.
- Ce n'est pas sensé l'être...
Il parlait avec une voix qu'elle
n'avait jamais entendu. Elle avait peur. Alors il tenta de
l'embrasser. Elle serait les mâchoires de toutes ses forces,
tournant dans des mouvement brusques sa tête dans tous les sens pour
échapper aux lèvres de son oncle. Alors, il sera une main autour du
cou de Lou. Elle stoppa net ses mouvements. Elle avait du mal à
respirer, elle était immobilisée. L'oncle passa sa main libre sous
le pull de la jeune fille et commença à lui caresser le ventre et
les seins. Elle voulait crier, mais le souffle lui manquait. Elle
voulait le repousser, mais elle était incapable de bouger. Pour la
déshabiller, il du desserrer son étreinte. Elle voulait s'échapper,
partir en courant. Mais le seule chose qu'elle fut capable de faire,
ce fut de dire :
- Arrête, s'il te plaît.
Il sourit, lui enlevant son soutien
gorge et son jean. Il se pressa à nouveau contre elle. Elle sentait
son pénis en érection contre son ventre et se mit à trembler. Ses
jambes ne purent plus soutenir son corps qui se laissa glisser contre
le mur jusqu'au sol. Son oncle se déshabilla entièrement. Il la
prit voilement par le bras et la jeta sur le lit. Elle tremblait
toujours. Elle voulait hurler, se débattre, mais rien à faire :
son cerveau était incapable d'envoyer les message nécessaires à
ses membres pour agir. C'est comme si elle était à l'extérieur de
son corps, elle voulait se gifler : « Fais quelques
chose » criait une voix dans sa tête. L'homme lui arracha sa
culotte et s'allongea sur elle. Elle eut le réflexe de serrer les
cuisses. Mais quarante cinq kilos de femme ne peuvent rien contre
quatre-vingt dix kilos de muscles muent pas un désir lubrique. Il la
pénétra. Elle ne ressentit pas une douleur atroce comme elle
l'appréhendait. La sensation était désagréable, c'est tout. Elle
tourna la tête de manière à ne pas le voir. Elle fixait le mur.
Une larme perla et glissa sur sa tempe pour disparaître dans ses
cheveux. La respiration de l'homme sur elle était de plus en plus
forte, ses mouvements de plus en plus rapides. Elle languissait qu'il
termine
- Les secondes me paraissaient des
années.
Quand il eut fini, il se releva et se
rhabilla. Lou tourna tout son corps vers le mur, repliant ses jambes
vers sa poitrine. Une fois rhabillé, il alla s'assoir au bord du lit
et se mit à lui caresser les cheveux.
- Tu es une gentille fille, dit-il.
C'est ce qui lui fit le plus mal. Plus
que les gestes, cette phrase lui porta le coup fatal. Il se leva et
partit referment délicatement derrière lui la porte de la chambre.
Lou resta là, incapable de bouger. Incapable de penser. Incapable de
vivre. Au bout de quelques minutes, ou de quelques heures, elle
réussit à se trainer jusqu'à la douche.
Quand sa tante l'appela pour passer à
table le soir, elle descendit à la cuisine, comme un automate. Son
oncle se comportait comme si de rien n'était. Le repas se déroula
comme chaque soir. Lou n'arriver pas à manger.
- Quelque chose ne va pas ?
demanda son oncle.
- Je ne me sens pas très bien, c'est
tout.
Elle aida sa tante à débarrasser la
table. Son oncle et son cousin étaient encore assis. Elle se tenait
devant le lave-vaisselle, les assiettes à la main. Les mots
sortirent de sa bouche avec le même ton que si elle avait affirmé
qu'il faisait froid. Il n'y avait ni tristesse, ni colère, ce fut
une simple affirmation :
- Patrick m'a violé.
- Cette simple phrase me value de
passer presque la totalité de sa seizième année en hôpital
psychiatrique. J'étais dépressive, mais pas au point d'être
enfermée. Bien sûr, ma tante ne m'avait pas cru, me traitant de
folle. C'est elle qui avait prit la responsabilité de me faire
interner. Ne ne lui en voulais pas, j'en voulais à Patrick. S'il
avait avoué, il m'aurait épargner ces longs mois au service de
pédopsychiatrie. Mais que valait la vie d'une orpheline dépressive
face à la tranquillité d'une homme équilibré ?
La suite ? C'est par ici.
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